Raymond MOCAËR
Pour notre ami Raymond Mocaër, décédé le 7 janvier 2021 jour de sa fête, il avait 94 ans.
« Tu vas voir, tu vas pleurer mais tu ne comprendras pas. Pour comprendre, il faut avoir été ici avec la mort ». Tels étaient les mots d’Edmond Michelet en accueillant Maurice Schumann à l’entrée du camp de concentration nazi de Dachau.
Pour notre ami Raymond, c’est à Neuengamme puis à Sachsenhausen qu’il aura vécu avec la mort durant des mois épouvantables, et justement dit, jusqu’à la fin des Marches de la mort en tombant d’épuisement dans les bras d’un soldat américain.
Pourquoi ce breton de la campagne va-t-il endurer tant de souffrances ? Parce qu’il est révolté à la vue du drapeau nazi sur la Château de Versailles et qu’il va utiliser son arme contre l’occupant passage Saint Pierre à Versailles où il réside et travaille. Sur dénonciation, il est arrêté. Il a 17 ans.
Après être passé dans les locaux de la Gestapo, il est poussé dans un wagon à bestiaux du convoi du 6 juin 1944, déporté vers les Camp de la mort où il ne sera plus qu’un numéro, un « stuck » (un morceau comme disaient les SS !)
D’abord à Neuengamme. A 25 km d’Hambourg, dans un méandre de l’Elbe, ce camp immense de l’Allemagne du Nord baigne dans un vaste marais exposé au souffle glacé du vent de la Baltique. Il est maudit par sa situation, mais surtout pour son encadrement par des criminels à la bestialité servile à l’égard des SS, et par l’ultime tragédie qui verra 7300 survivants périr dans les eaux glacées de la Baltique.
Ensuite à Sachsenhausen, au nord de Berlin. Raymond présentera une maquette de ce camp lors de la dernière exposition de la Mairie de Versailles sur le thème de la libération des Camps. Il est très ému en nous décrivant les lieux comme sa baraque, la place d’appel, la fabrique de fausse monnaie, la piste d’essai longue de 700m de sable, de glaise, de caillou, de goudron et d’eau, sur laquelle les suppliciés doivent tester de « broquetins » militaires en portant des charges de 20 à 30 kgs de 6h à 17h.
Affecté au Kommando de Klinker, il sera contraint aux travaux de carrière de pierre.
Raymond va endurer les terribles derniers mois de guerre avec un hiver rigoureux, les sévices, le travail forcé, le manque de nourriture et les bombardements alliés sur Berlin ; mais il garde le moral car la défaite allemande est proche. La Liberté pour laquelle il a pris des risques et souffert de la déshumanisation des camps est proche.
Mais Raymond va vivre encore une terrible épreuve, peut-être la pire : le 21 avril 45, l’évacuation du camp est décidée. Avec un groupe de 500 déportés il va connaitre une « marche de la mort ».
L’épuisement et le danger de se faire descendre par un SS est le calvaire qu’il va subir jusqu’au 2 mai.
Il avait vécu avec la mort mais la mort ne l’avait pas pris.
Vice-président de notre Association départementale, Raymond Mocaër va témoigner longtemps de cette leçon des ténèbres par son parcours concentrationnaire auprès des lycéens, dans la cadre du Concours National de la Résistance et de la Déportation. Nous le revoyons sensible à l’hommage que lui rendent les lauréats lors d’une remise des prix à la Préfecture. Raymond avait un grand plaisir à rencontrer les jeunes. Il avait confiance en cette jeunesse.
Au revoir Raymond, vous qui avez rejoint la foule immense des martyrs de la Déportation résistante.
Reposez en Paix, vous qui avez lutté pour elle !
Madame Jacqueline Fleury, présidente de l’UNADIF-FNDIR 78, Grand’Croix dans l’Ordre national de la Légion d’Honneur
Monsieur Hervé Fleury, vice-président
NDLR : Les obsèques de Raymond Mocaër seront célébrées le mardi 19 janvier 2021 à 10h en l’église Notre-Dame-du-Chêne de Viroflay, ville où il résidait.
Photo D.R. Actu.fr Yvelines https://actu.fr/societe/yvelines-raymond-mocaer-figure-de-la-resistance-est-decede_38625345.html
En 2018, il publia ses mémoires https://actu.fr/ile-de-france/viroflay_78686/yvelines-raymond-mocaer-raconte-drole-destin-dans-livre_18740140.html